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'L'alsacien: support d'identité régionale '
 
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L'alsacien: support d'identité régionale

Cela vaut également pour l'Alsace, où l'alsacien s'est maintenu comme langue régionale germanique. Après que les Alamans eurent réussi à percer le Limes et se furent installés dans la région du Rhin Supérieur, leur langue put rapidement s'imposer. Une frontière linguistique s'établit le long des Vosges, séparant désormais la région située sur la rive gauche du Rhin du reste de la Gaule où le latin resta langue officielle même après la défaite définitive des Romains, tandis que la région située à l'est des Vosges fit désormais partie de l'espace linguistique allemand qui se prolongeait au-delà du Rhin. La situation linguistique ne changea tout d'abord guère, même lorsque l'Alsace fut rattachée au royaume de France au XVIIe siècle par le traité de Westphalie, Louis XIV voulant avant tout l'assimilation territoriale, plus que linguistique.

La situation devint par la suite plus complexe, la région changeant plusieurs fois d'appartenance politique après la guerre franco-allemande de 1870/71. Ces changements successifs s'accompagnèrent d'une politique linguistique (politique culturelle) offensive menée par les dirigeants respectifs, en particulier durant l'époque de l'Empire allemand, lorsque l'allemand redevint la langue officielle dans le Reichsland Elsaß-Lothringen [1] , après 220 années d'appartenance francophone, et qu'une grande intolérance vis-à-vis du français s'y manifesta.

La situation bascula à nouveau après la Première Guerre mondiale. L'administration redevenue française pratiqua alors une politique d'assimilation linguistique et culturelle poussée à l'extrême, sans tenir compte des particularités alsaciennes. Le français devint la seule langue officielle autorisée pour une population à 90 % germanophone, l'usage de l'allemand étant même interdit sous peine de sanctions.

Après l’intermède de la Seconde Guerre mondiale et ses signes avant-coureurs de changements politiques entre 1940 et 1945, la lutte engagée contre les langues régionales se poursuivit tout d'abord en France. Ce n'est qu'au début des années 1950 que ces dernières furent à nouveau progressivement autorisées (par ex. par la loi Deixonne [2]  de 1951), ce qui ne signifia pas pour autant leur acceptation sans réserve, encore moins leur promotion. On tenta plutôt de persuader la population qu'il était tout simplement "chic" de parler le français, que l'alsacien était au contraire "paysan" et qu'il n'avait aucun avenir.

Fig. 25

 

 

 

 

 

La Loi Deixonne (1953) représente certes un éloignement de la politique des langues restrictive, mais ne signifie pas pour autant une promotion des langues régionales. On tenta plutôt de persuader la population qu'il était tout simplement "chic" de parler le français,, ainsi qu l'illustre une caricature de Tomi Ungerer, que l'alsacien était au contraire "paysan" et qu'il n'avait aucun avenir.

Fig. 26

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Source Internet [3]

Du point de vue géolinguistique, l'alsacien est un dialecte alémanique englobant plusieurs variantes. Les Alsaciens âgés sont souvent bilingues et maîtrisent aussi bien le français que l'alsacien. L'emploi de l'alsacien est cependant le plus souvent limité au domaine de la vie privée. Le français prédomine par contre dans la vie publique: c'est la langue de l'enseignement, des médias, de l'administration et en grande partie aussi du monde du travail.

L'alsacien est cependant quelque peu menacé puisque près de 20 % seulement des enfants scolarisés maîtrisent vraiment cette langue. Cet état de fait résulte du détachement délibéré de l'Allemagne après la Seconde Guerre mondiale, en réaction au Troisième Reich. Cela explique aussi pourquoi les Alsaciens n'ont opposé qu'une faible résistance à la politique d'assimilation linguistique de l'État français après la Libération en 1945. Si cette tendance venait à se poursuivre, l'alsacien perdrait encore du terrain au cours de la prochaine génération.

L'évolution semble cependant s'inverser depuis quelques décennies. En 1981, la libéralisation du système éducatif a entraîné une détabouisation de la problématique alsacienne. En conséquence, l'enseignement de l'allemand, qui n'existait pas en tant que matière scolaire jusqu'en 1970, a été réintroduit pour les deux dernières années de l'école élémentaire. Ceci contribuera certainement à préserver la langue allemande, même si la vie culturelle alsacienne fait depuis longtemps partie de la culture française dans de nombreux domaines (cf.: Landeszentrale für politische Bildung, 1996, pp. 4-5).

Fig. 27

 

 

 

Source: Deutschland und Europa, Heft 32, Landeszentrale für Polit. Bildung BW, 1995, p. 4