Tous les manuels ne parlent pas de l'origine du nom ^[1] "Europe". L'un d'eux indique qu'il désignait "seulement une direction". "En Mésopotamie, on disait 'ereb' ("pays du soleil couchant"). Le terme d'Europe ^[2] a été repris par les Grecs. Les marins grecs appelaient Europe toutes les terres situées au nord de la Méditerranée" (G/B7 1998: 6). Pour un autre manuel scolaire, le nom signifie "à peu près 'pays du coucher de soleil' ou occident. L'Asie au contraire est le 'pays du lever de soleil', l' orient" (T 1991: 6). Un autre livre est plus prudent et différencie davantage: "Notre continent serait [!] tiré du mot 'ereb' (= 'sombre' dans le sens de pays du soleil couchant). Les Phéniciens, un peuple de marins, désignaient ainsi la côte Ouest de la Mer Egée. Par opposition, ils nommaient la côte Est 'asu' ('pays du soleil levant'). Plus tard, les Grecs employèrent le terme également pour les terres situées en arrière des côtes. Le terme 'ereb' donna Europe, d' 'asu' fut tiré Asie" (HuW/B7 1999: 8).

A côté de cette dérivation géographique du nom, on trouve aussi la variante mythologique: l'enlèvement d'Europe, fille du roi phénicien, par Zeus qui avait pris la forme d'un taureau. Certains manuels se contentent d'une image avec une courte explication qui parfois même n'évoque que vaguement comment le nom a été transmis au continent (G2 1993: 6) (1 ^[4] ). Un autre conclut avec la citation de Zeus: " 'Immortelle tu seras, Europe; car le continent qui t'a accueilli devra porter ton nom pour tous les temps'." Frank (1991b) et Neumann-Mayer (2002) reprennent également le mythe. Neumann-Mayer le raconte sous forme de texte à trous. Les élèves doivent remplir les blancs avec les mots Asie, Europe, Taureau et Crète à partir de lettres mélangées et d'illustrations. Puis sur une carte représentant le monde selon Eratosthène, ils doivent tracer les frontières de l'Europe à son époque.

Les deux dérivations du nom sont présentées de manière beaucoup trop apodictique ^[6] . Dans l'Antiquité, le nom Europe ne désigne pas du tout seulement un point cardinal, mais aussi des villages, rivières et paysages, et le nom propre a été porté par plusieurs personnes. La racine linguistique présentée dans les textes comme certaine est vraisemblablement fausse, "le sens originel du nom de paysages sans doute prégrec (…) ne peut plu être déterminé" (Demandt 1998: 138 et suiv.). Le fait de se baser sur le mythe est même considéré comme une erreur. Il n'aurait "pas le moindre rapport [avec le nom du continent]"; car non seulement le lieu d'origine de la princesse, mais aussi la destination choisie par Zeus, la Crète, aurait d'après la conception antique fait partie de l'Asie: "L'image du mythe est donc en tant que métaphore – qu'elle soit sérieuse ou caricaturale – d'une future Europe unie une erreur à tous les points de vue" (Girardet 2001: 105 et suiv.). Sur la carte d'Eratosthène que doivent compléter les élèves, la Crète est au contraire représentée comme faisant partie de l'Europe et il n'est nullement indiqué qu'il ne s'agit là que d'une tentative de reconstruction (Neumann-Mayer 2002: 5, 14).